Balade sur les traces de Jul

Une voiture à l’arrêt au feu rouge, les vitres baissées. S’en échappe la mélodie d’un rap en mode auto-tune, reconnaissable dès les premières notes et 100% local : celui de Jul. Dans les rues de Marseille, cette scène serait presque banale, tant l’artiste est écouté. Dans d’autres villes françaises, voire ailleurs dans le monde, serait-elle en passe de le devenir ? C’est certain, car la popularité de Jul semble inarrêtable. Fin 2024, Spotify dévoile son Spotify Wrapped, bilan annuel des écoutes des utilisateurs. En France, le rappeur Marseillais prend la tête du classement… pour la cinquième année consécutive. Dès 2020, il devenait le plus gros vendeur de disques de l’histoire du rap français. Né en 1990, Jul, de son vrai nom Julien Mari, grandit avec sa mère dans le 5e arrondissement de Marseille, cité Louis Loucheur, dans le quartier Saint-Jean-du-Désert. Dans ses textes, la cité phocéenne, qui l’inspire depuis toujours, est présente à chaque punchline. Comme il le résume si bien, « Marseille, ma ville, j’l’aime à mort » (« Alors la zone », album Demain ça ira, 2021).

En 2020, Jul réunit des têtes d’affiche du rap local sous la bannière du 13 organisé. Le clip de « Bande organisée », qui met – entre autres – en scène SCH, Naps ou Soso Maness, atteint rapidement les 100 millions de vues sur Youtube. (Presque) tout le monde a entendu au moins une fois ses célèbres paroles (ici le passage interprété par Kofs) « 1.3, Audi Sport, j’passe la douane les rapports / Nique ta mère sur la Canebière / Nique tes morts sur le Vieux-Port / Mi amor, c’est les quartiers Sud, c’est les quartiers Nord ». Ce dernier a également servi de décor au clip de « Bande organisée 2 », où les artistes sont filmés sur le toit d’un bus. Autre scène culte : le 8 mai 2024, à l’occasion de l’arrivée de la flamme olympique à Marseille par la mer, Jul, invité surprise de la cérémonie, enflamme le public venu en nombre sur le Vieux-Port. Fans ou curieux, poussez la marche jusqu’au pied de Notre-Dame-de-la-Garde, dans le quartier de Vauban, où l’OM a inauguré en 2024 un city stade à son effigie.

Jul a aussi son pop-up store (sa boutique éphémère). Direction le quartier de la Joliette et plus précisément son centre commercial avec vue sur mer : les Terrasses du Port. À chaque ouverture annoncée du Jul Store, lors de la sortie d’un nouvel album, les aficionados s’y bousculent. Après s’être armés de patience dans la file d’attente, ils achètent ici T-shirts, casquettes, albums siglés et autres claquettes chaussettes (l’outfit préféré de Jul). Ceux qui sont à la recherche du total look n’ont pas à aller bien loin : aux Terrasses du Port, on trouve aussi un magasin Décathlon. Une enseigne particulièrement prisée de l’artiste : « J’ai fait des sous et je m’habille à Décathlon », chante-t-il fièrement dans « Je dirais plus je t’aime » (album La zone en personne, 2018). C’est donc très logiquement que l’on peut ici croiser des fans venus acheter survêtements Kalenji et vestes Quechua pour peaufiner leur style.

Dans la cité phocéenne, rap et foot ne vont jamais l’un sans l’autre. Fidèle à ses origines, Jul le marseillais ne déroge pas à cette tradition, bien au contraire. « Bande organisée » s’ouvre sur plusieurs plans tournés dans les vestiaires et sur la pelouse de l’Orange Vélodrome. Le 6 juin 2020, Jul doit d’ailleurs s’y produire. Mais l’événement est annulé à cause du covid. Finalement, ce n’est que partie remise : il y chantera en 2022… Et en fera une chanson : « 4 juin 2022 » , (album Extraterrestre, 2022) : « en claquettes dans la zone, j’fais chanter tout le Vélodrome ». Il y remontera sur scène le 24 mai 2025. Depuis l’Orange Vélodrome, on peut rejoindre l’Escale Borély à pied en 45 minutes. Ce front de mer, avec sa grande roue et ses bars, est un lieu star de son morceau « Alors la zone » : (album Demain ça ira, 2021), dont on ne se lasse jamais : « J’ai trouvé un bail j’suis pas là / J’suis pas à Dubaï, j’suis à l’Escale ».

On vous déconseille d’aller y jouer les touristes, en revanche rien ne vous empêche d’écouter (ou regarder le clip de) « quartier nord », avec GGN et Bayssou. Jul s’y affiche même sur les murs : son portrait, signé de l’artiste Hoveh, s’étale sur une fresque de 23 mètres de haut qui habille la façade d’un immeuble du 16e arrondissement, près de la cité Consolat. Vous la verrez bien en empruntant l’A55. Pour terminer en beauté, on vous indique deux autres lieux de Marseille – parmi d’autres – cités dans les chansons de Jul : le boulevard Sakakini, dans le 5e arrondissement (dans « Sakakini », album Rien 100 Rien, 2019) : « J’fais un live, tu les vois faire le signe Jul sur le boulevard Sakakini ». Et le chemin de Morgiou, où se trouve la prison des Baumettes, à retrouver dans le titre éponyme (album Indépendance, 2021). On vous souhaite une bonne balade musicale. Et vive le rap marseillais !