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L’histoire des papes en Avignon

De 1309 à 1376

Au XIVe siècle, Avignon devient le cœur de la chrétienté en accueillant la papauté durant près de 70 ans. Ce déménagement temporaire de Rome vers le Comtat Venaissin propulse cette petite ville provençale sur le devant de la scène internationale. Sept papes se succèdent, chacun marquant l’histoire d’Avignon, avant que le retour à Rome ne soit finalement décidé.

Quand Avignon accueille la cour pontificale

L’installation des papes à Avignon commence avec Clément V, en 1309. L’Italie et Rome traversent alors une période de grande instabilité, rendant la ville éternelle peu sûre pour la papauté. Le choix d’Avignon est dicté par plusieurs facteurs :

  • Sa position géographique stratégique aux portes du plus puissant royaume de l’époque ;
  • Son appartenance au Comtat Venaissin, un territoire prospère sous influence pontificale ;
  • La stabilité relative de la Provence, mieux administrée et loin.

Durant cette période, la cour pontificale attire une importante population de nobles, de clercs et de marchands, transformant la ville en une capitale religieuse et commerciale. Les souverains pontifes construisent une imposante résidence fortifiée, le célèbre Palais des Papes, et dotent la ville de remparts Les hôtels particuliers fleurissent et la cité devient l’une des plus belles et des plus riches de toute la Chrétienté.

Clément V (1305-1314)

Clément V est intronisé à Lyon le 14 novembre 1305. Élu après une longue période de vacance du trône pontifical, son pontificat est marqué par l’influence du roi de France, Philippe le Bel, ce qui explique en partie son installation dans une ville proche du royaume de France. Il est en effet le premier pape à installer officiellement la papauté en Avignon. Il s’installe d’abord chez les frères dominicains, puis rejoint le palais de l’évêque. Cette résidence doit être temporaire, le temps que les troubles s’apaisent à Rome.

Clément V est surtout connu pour avoir convoqué le concile de Vienne en 1311, qui déboucha sur la suppression de l’Ordre du Temple sous la pression de Philippe le Bel. Bien qu’il n’ait pas résidé dans le Comtat Venaissin tout au long de son pontificat, Clément V pose les bases de l’installation de la papauté à Avignon.

Jean XXII (1316-1334)

Coiffant la tiare pontificale à l’âge canonique de 72 ans, Jean XXII est destiné à être un pape de transition. Mais sa santé de fer lui offre un règne de 18 ans ! Ce grand juriste est le premier pape à s’installer durablement à Avignon.

Durant son pontificat, il renforce l’autorité pontificale et joue un rôle majeur dans les querelles théologiques de l’époque, notamment en condamnant l’hérésie des spirituels franciscains. Il est également à l’origine de l’accroissement des institutions administratives pontificales à Avignon, transformant la ville en véritable centre du pouvoir chrétien. Jean XXII commence également la construction de ce qui deviendra le Palais des Papes, lieu symbolique du pouvoir religieux devenu l’un des plus beaux édifices d’architecture gothique de son temps.

Benoît XII (1334-1342)

Succédant à Jean XXII, Benoît XII poursuit l’embellissement d’Avignon. Il est connu pour avoir commandé la reconstruction du Palais des Papes, qu’il trouve trop modeste. Son projet, sous la direction de l’architecte Pierre Poisson, transforme le palais en une forteresse imposante, témoignage de la puissance de l’Église.

Sur le plan spirituel, Benoît XII est un réformateur. Ce grand théologien attaché à la doctrine cistercienne cherche à imposer une stricte discipline au sein des ordres religieux, notamment par la réforme des monastères.

Il renforce le rôle d’Avignon en tant que centre de la Chrétienté occidentale, mais peine à imposer ses réformes. Sous son règne débute l’un des plus longs conflits du Moyen-âge, la guerre de Cent Ans qui oppose la France à l’Angleterre de 1337 à 1453.

Clément VI (1342-1352)

Ce moine bénédictin est le plus connu des papes d’Avignon. Surnommé le Magnifique, Clément VI est sans doute l’un des papes les plus flamboyants à résider à Avignon. Son pontificat est marqué par un goût prononcé pour le luxe et la vie fastueuse. Il achète la ville d’Avignon en 1348 à la reine Jeanne de Naples, garantissant ainsi à la papauté un contrôle total sur la cité, et embellit la résidence de ses prédécesseurs avec la construction du  palais neuf.

Durant son règne, il fait également face à la Peste noire qui ravage l’Europe. Clément VI offre refuge aux populations persécutées, notamment aux Juifs, accusés d’avoir provoqué l’épidémie : ces derniers, accusés de propager l’épidémie, sont innocentés avec la publication de deux bulles

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Innocent VI (1352-1362)

Innocent VI est un pape réformateur, qui œuvre pour réduire la corruption et restaurer la discipline au sein de l’Église. Son pontificat est marqué par des efforts pour renforcer l’autorité papale et limiter les abus des cardinaux. Sur le plan politique, Innocent VI intervient activement dans les affaires italiennes et cherche à rétablir l’autorité pontificale sur Rome.

Il continue également l’embellissement d’Avignon et assure sa protection par la fortification des murs de la ville. Le Comtat Venaissin est en effet menacé par les Grandes Compagnies, des bandes de mercenaires désœuvrées lors des trêves dans le long conflit entre la France et l’Angleterre

Urbain V (1362-1370)

Urbain V tente de ramener la papauté à Rome, conscient que la résidence en Avignon affaiblit l’autorité spirituelle de l’Église. En 1367, il quitte Avignon pour s’installer à Rome, mais les troubles politiques et l’insécurité le forcent à revenir en 1370. Urbain V est également un homme de foi, dédié à la réforme des ordres religieux et à l’amélioration de la discipline ecclésiastique.

Son pontificat est marqué par un grand souci porté à l’éducation, notamment par son action dans la fondation d’universités telles que la faculté de médecine de Montpellier et les universités de Cracovie et de Vienne. Moine bénédictin, abbé de l’abbaye de Saint-Germain d’Auxerre puis de l’abbaye de Saint-Victor, Urbain V est considéré comme un humaniste et un grand bâtisseur.

Grégoire XI (1370-1378)

Neveu de Clément VI, Grégoire XI est le dernier pape à résider à Avignon. Sous l’influence de sainte Catherine de Sienne, il décide de ramener définitivement la papauté à Rome. Amorcé en 1376, ce retour exige la pacification des États Pontificaux et une lutte contre de puissants adversaires : Grégoire XI doit notamment obtenir une paix durable avec la ville de Florence, cité prospère en Toscane. L’arrivée à Rome en 1377 marque aussi le début d’une nouvelle crise pour l’Église : durant le Grand Schisme d’Occident, plusieurs souverains pontifes revendiquent en effet le trône pontifical.

Le départ de Grégoire XI signe la fin de la présence papale à Avignon, mais la ville garde un rôle important dans l’histoire ecclésiastique. Des papes continuent à siéger à Avignon et contestent l’autorité de Grégoire , et le Comtat Venaissin restera dans le giron pontifical jusqu’à la Révolution.

Le Grand Schisme d’Occident

Pendant plusieurs décennies, l’Europe chrétienne se déchire avec les règnes simultanés de deux papes.

Clément VII (1378-1394) est élu par une faction de cardinaux opposés au pape romain Urbain VI, qui lui reprochent d’avoir usé de pression pour obtenir le siège pontifical. Clément VII se réfugie à Avignon où il entreprend de lutter contre Urbain VI.

Benoît XIII (1394-1423) succède à Clément VII (1378-1394) et concurrence les souverains pontifes établis à Rome. Il  tente de maintenir l’autorité de l’Église d’Avignon, mais échoue à obtenir une reconnaissance durable. Le Grand Schisme d’Occident, qui menace l’unité spirituelle de tout le continent, prend fin en 1417 au concile de Constance. Benoît XIII refuse sa déchéance et rejoint les terres du roi d’Aragon, l’un de ses derniers soutiens. Avec sa mort en 1423 s’éteint définitivement l’épopée des papes en Avignon.

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